La Fontaine - En vers et contre tout! - Sylvie Dodeller
- Titre : La Fontaine - Envers et contre tout
- Auteur : Sylvie Dodeller
- Editions : L'école des loisirs
- Collection : Médium Poche
- Date de parution : 23 août 2017
- Nombre de pages : 112
- ISBN : 978-2-211-23510-5
Journaliste et écrivain, Sylvie Dodeller passe beaucoup de temps à arpenter les vielles rues de Paris, qui n'ont plus de secret pour elle.
Quatrième de couverture
Jean de La Fontaine, ce nom vous dit quelque chose?
Bien sûr, vous pouvez réciter quelques-uns de ses vers, voire des fables entières : La Cigale et la Fourmi, Le Corbeau et le Renard...
Mais l'homme? Ou plutôt "le bonhomme", comme l'appelaient ses amis?
Il n'a publié ses fables qu'à quarante-sept ans et s'est d'abord rendu célèbre grâce à ses contes pour adultes. Il aimait le vin, les femmes, le jeu et par-dessus tout la poésie. C'était un mauvais père, un piètre mari, mais un ami fidèle surtout avec les réprouvés et les bannis. Il ne fréquentait ni la cour ni Versailles, et Louis XIV ne le portait pas dans son coeur. Jean de La Fontaine, l'un des plus grands poètes français, reste pour beaucoup d'entre nous un illustre inconnu!
Mes impressions
Sylvie Dodeller nous livre ici une biographie de Jean de La Fontaine très instructive. On y apprend beaucoup sur l'homme, mais aussi sur ses contemporains et les rites et coutumes qui pouvaient régir leurs relations souvent tumultueuses.
La Fontaine, né à Château-Thierry en 1621 de Charles de La Fontaine, maître des Eaux et Forêts et de Françoise Pidoux, n'aimait pas l'école, il s'y ennuyait.
Il avait une très forte personnalité, et dès l'enfance, il n'a jamais accepté les contraintes, ne craignant pas les punitions qui pouvaient résulter de ce manque d'intérêt. Devant tout de même se soumettre aux études, après l'internat, il choisira le séminaire plutôt que le droit, pensant à tort y trouver plus de tranquillité et moins d'obligations.
Après en avoir été poussé vers la sortie, il retrouvera régulièrement ses camarades, dont Maucroix, rencontré à l'internat, au Cabaret La Table ronde (ils se feront d'ailleurs appeler les "Chevaliers de la Table ronde")
La Fontaine se marie peu de temps après, à 26 ans, en 1647, avec Marie Héricart qui en a quatorze. Ils auront un fils, dont il ne s'occupera que très peu, et qu'il ne verra pas grandir. Il finit par acheter l'office de Maître des Eaux et Forêts, comme son père l'y incitait depuis des années. Un métier qui sera une source d'inspiration bien des années après, pour les descriptions très justes qu'il fera aussi bien de la faune que de la flore dans ses célèbres Fables.
Il se liera plus tard d'amitié avec Nicolas Fouquet, qui suite à la somptueuse fête donnée pour l'inauguration de son château de Vaux le Vicomte tombera en disgrâce et sera anéanti par le roi Louis XIV. La Fontaine, qui n'a pas trahi cette amtié et a toujours soutenu Fouquet, ne sera jamais apprécié par le souverain.
Désargenté, ayant vendu tous ses biens, La Fontaine devra en permanence compter sur les autres pour trouver un toit, il deviendra même "gentilhomme servant" chez la duchesse d'Orléans au Palais du luxembourg et ne se mettra à écrire sérieusement que quand vraiment il sera acculé et aura tout perdu.
Avec les premiers succès de ses Fables, s'il n'obtient pas la reconnaissance du roi, à défaut de faire partie la cour, il fréquente les salons de Madame de La Fayette et de Madame de la Sablière, sous le toit de laquelle il vit d'ailleurs.
Envers et contre tous (et surtout le roi), il sera élu à l'Académie française et prendra le fauteuil n°24, celui de Colbert (une revanche prise sur le rival de son ami Fouquet?)
Rédiger une biographie de La Fontaine pour un jeune public était un vrai défi, brillamment relevé Sylvie Dodeller. En effet, elle parvient à raconter la vie du fabuliste comme une histoire. Dans un texte très contemporain, elle s'adresse parfois au lecteur (à la manière de La Fontaine?) tout en resituant chaque période dans son contexte.
Un vrai plaisir de lecture où les plus grands aussi peuvent apprendre! Je suis ravie d'avoir découvert ce livre grâce à l'Ecole des Loisirs, que je remercie. Je vais maintenant relire les Fables de La Fontaine!
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De la même auteure, chez le même éditeur, vous pouvez également découvrir :
Léonard de Vinci - Artiste ? Vous rigolez. ( Médium Poche, 2009 )
Molière - Que diable allait-il faire dans cette galère ? ( Médium Poche, 2005 )
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p.10 "Pensez-vous que la menace de ces châtiments corporels inquiète Jean de La Fontaine? Pas le moins du monde. Elle glisse sur lui comme l'eau sur les plumes d'un canard et ne l'empêche ni d'être en retard ni de décrocher si le cours l'ennuie. Cette indifférence à toute forme d'autorité lui vaut l'admiration secrète de ses camarades."
p. 25-26 "Eh quoi? Leurs pères veulent faire d'eux des avocats, des secrétaires particuliers, des Maîtres des Eaux et Forêts, des gestionnaires de patrimoine, alors qu'ils brûlent de vivre hors des normes et des conventions sociales. Esprits libres, caractères indépendants, ils préfèrent à la réussite et à la carrière les plaisirs vertigineux de l'esprit. C'est décidé, l'écriture sera la grande affaire de leur vie."
p.34 "Et quand il s'agira d'évoquer la chasse et le gibier, Jean saura employer les mots précis du Maïtre des Eaux et Forêts. Il évitera ainsi les "chiens de chasse" trop communs pour leur préférer les espèces plus typées que sont les chiens bassets, les riffauts, les mirauts, les rustauds."
p.43 "Fouquet s'est mis en tête de faire construire un château unique, exceptionnel, sur ses terres de Vaux-le-Vicomte, et de confier ce projet grandiose aux artistes les plus "tendance" du moment. La dream team se compose de Le Brun, peintre et décorateur, Le Vau, architecte, Le Nôtre jardinier-paysagiste, La Quintinie, maître des potagers, Puget et Anguier, auteurs des sculptures qui ponctueront les allées, sans oublier Jean de La Fontaine, poète officiel chargé de faire toute la publicité à ce projet, sans tambour ni trompette, mais en vers destinés à circuler dans tout le royaume..."
p.59-60 "Jean de La Fontaine a sans doute testé ses premières fables devant cette docte et joyeuse assemblée.
On imagine l'air surpris de ses confrères...
"Des fables? On les rabâche depuis des siècles! Elles ne sont bonnes qu'à enseigner la morale et le latin aux collégiens."
Puis leur air de contentement alors que le poète déroule les premiers vers de La Cigale et la Fourmi...
On s'y croirait, on voit la scène. Les apologues d'Esope sont éclipsés à jamais. Il a fait d'une chenille un papillon! D'une miniature une fresque!"
Sans parler de leurs oreilles qui frémissent de plaisir...
"Un vers en appelle un autre, l'ensemble coule, chante, sonne. Le rythme, les pauses, les accents, tout est harmonie!"
Une nouvelle fois, le bonhomme les a soufflés. Ils l'encouragent vivement à poursuivre son projet et à publier. Comme si La Fontaine n'y avait pas pensé!"
p.61 "Du jour au lendemain, Paris bruisse de fables. On se les lit à haute voix entre amis ; on les déclame, gobelet à la main, dans les cabarets ; on les médite chez soi, emmitouflé près de la cheminée ; on les offre à ses enfants, à ses proches ; on en recopie des passages entiers dans les lettres que l'on envoie aux amis éloignés."
p.70 "Visiblement, Jean de La Fontaine traverse une mauvaise passe. On le croise souvent, la perruque de traviole, les bas dépareillés, sortant d'un tripot où il vient de perdre à la bassette, un jeu de cartes furieusement à la mode, le peu d'argent qui lui reste. Heureusement, il n'a pas le temps de tomber plus bas, un ange gardien vient à sa rescousse. Mme de La Sablière lui propose de le dépanner et de le loger, chez elle, dans son bel hôtel particulier de la rue Neuve-des-Petits-Champs. Le dépannage durera vingt ans..."